Pour la toute première fois, le musée illumine, à partir du mercredi 28 juin, la façon dont des créateurs, précurseurs en leur temps, ont participé à la métamorphose de l’image des communautés LGBT.
Présentée jusqu’au 13 novembre au Centre Pompidou se trouve l’exposition De l’autre côté de l’arc-en-ciel. Plus de 500 œuvres d’art et documents rares tels que des livres, des magazines, des photos, des films anciens et des peintures, provenant principalement des collections de la galerie d’art et de la Bibliothèque Kandinsky, le centre de recherche associé, forment cette collection unique.
Au fil de l’exposition, on découvre un univers d’archives uniques et fascinantes de la culture LGBTQIA+, qui sont restées longtemps cachées, soit en raison de la censure, soit de l’indifférence. Le Centre Pompidou attire cependant l’attention des visiteurs en soulignant : « Certaines œuvres, par leur teneur sensuellement explicite, pourraient toucher la sensibilité de certains« . De ce fait, l’accès à l’exposition est déconseillé aux mineurs.
« L’épine dorsale de cette exposition repose sur la question de savoir comment des artistes, indépendamment de leur orientation sexuelle, ont cherché à projeter une image positive pour combattre les stéréotypes qui ont longtemps été la norme« , déclare le conservateur Nicolas Liucci-Goutnikov, commissaire de De l’autre côté de l’arc-en-ciel et responsable de la Bibliothèque Kandinsky.
« Cette exposition n’est pas à 100% exhaustive, mais elle met en scène des moments marquants de l’histoire sociale et culturelle des sexualités, et une kyrielle d’œuvres richement variées ayant pour dénominateur commun d’affirmer, chacune à leur manière, ce que la représentation homophobe nie« , complète-t-il. Le parcours commence avec l’évocation du Paris lesbien des années 1930 et du « salon de l’Amazone », discret cercle littéraire et artistique fondé par Natalie Clifford Barney, une expatriée américaine, et fréquenté par de nombreuses personnalités telles que Marie Laurencin, Romaine Brooks, Sylvia Beach et Greta Garbo, pour ne citer qu’elles.
L’intersection de l’art et de l’activisme
L’exposition présente entre autres le tableau Femmes à la colombe, un autoportrait à l’huile de Marie Laurencin en compagnie de la styliste Nicole Groult, sa compagne. Les dessins homo-érotiques de Jean Cocteau et ses compagnons, dont Raymond Radiguet et Jean Marais, occupent une place de choix, tout comme une rare édition de 1930 de son œuvre Le Livre Blanc, premier manifeste homosexuel que Cocteau n’a pas signé à sa première publication en 1927, mais seulement les illustrations qui l’accompagnent quelques années plus tard.
Le film autrefois censuré Un chant d’amour de Jean Genet, qui percevait la pédérastie comme une forme de rébellion contre la société, est exposé. L’exposition mentionne aussi les premières transitions de genre avec les peintres Michel-Marie Poulain et Lili Elbe, considérés comme les premiers à avoir subi une chirurgie de réattribution dans les années trente.
Le rôle des artistes dans l’activisme, à travers des affiches symboliques de la lutte contre le sida, est également exploré. L’exposition présente en outre des éléments relatifs aux fétichismes, notamment une toile d’Andy Warhol, Oxidation painting, récemment acquise par le Centre Pompidou, et peinte avec l’urine des modèles qui ont fréquenté la Factory dans les années 70.