Témoignage: « Réaction de rejet de mon amie » – 40 ans après découverte du Sida, préjugés persistent

Le 20 mai 1983, on a dévoilé l’existence du virus à l’origine du Sida. Quatre décennies plus tard, la perception de la société à l’égard des individus séropositifs change de manière positive. Néanmoins, plusieurs continuent à éprouver de l’exclusion ou de la crainte.

Anne est séropositive depuis 38 ans et affirme se porter très bien. Elle a été contaminée à l’âge de 21 ans lors du scandale du sang contaminé en 1985. À cette époque, elle décide qu’elle n’aura pas d’enfant pour ne pas risquer de contaminer un bébé ou laisser un enfant sans mère. Elle est aujourd’hui chercheuse et très engagée dans l’association Aides. Grâce à son traitement, bien qu’elle soit séropositive, elle ne peut plus transmettre le virus.

Depuis le diagnostic, elle s’est toujours demandé s’il fallait révéler sa condition aux autres. Seuls ses parents étaient au courant en 1985, mais ses autres proches ont finalement découvert la vérité neuf ans plus tard, lorsqu’elle est tombée gravement malade. Elle a réussi à intégrer le Centre national de la recherche scientifique (CNRS) mais n’a pas révélé sa séropositivité lors de l’examen médical, par crainte que cela n’entache sa carrière professionnelle. Elle a finalement choisi de le dire dans les années 2000.

Il reste encore de nombreuses discriminations et préjugés

Anne a été honnête avec sa banque, mais elle soupçonne que cela ait joué un rôle dans le refus d’un prêt immobilier 20 ans plus tard. Au fil des années, elle a renoncé à vivre une vie sentimentale en raison des réactions négatives des hommes qu’elle rencontrait. Si elle rencontrait quelqu’un aujourd’hui, elle ne lui révélerait pas immédiatement sa séropositivité, car elle sait qu’il n’y a aucun risque pour son partenaire. Malgré cela, les préjugés persistent. Elle raconte une expérience récente où une amie a eu une réaction de rejet en voyant Anne toucher les lèvres de son bébé, même après avoir expliqué qu’elle n’était pas contaminante.

En 2023, il n’y a toujours pas de traitement contre le virus du sida, mais on peut vivre avec presque normalement sans transmettre le virus grâce aux médicaments. Les traitements antirétroviraux sont moins lourds qu’auparavant : un comprimé par jour au lieu de 16 au début des années 2000. Cependant, ils doivent être pris tous les jours et à vie pour réduire la charge virale et rendre une personne séropositive non contaminante. Tant qu’elle suit le traitement et le fait rapidement, il n’y a aucun risque pour ses partenaires sexuels ou pour un bébé en cas de grossesse chez une femme.

À la recherche d’un vaccin pour guérir

Trouver un vaccin est la priorité absolue pour la recherche. Actuellement, 72 hommes participent à un essai mené par l’Institut de recherche vaccinale (IRV) français. L’étude a montré que le vaccin est bien toléré, mais son efficacité clinique reste à démontrer. Le professeur Jean Daniel Lelièvre, responsable du département de recherche clinique à l’IRV, reste optimiste malgré les difficultés, mais il est peu probable qu’un vaccin soit disponible sur le marché avant au moins dix ans.

En attendant, la PrEP, le traitement préventif qui permet aux personnes à risque d’éviter l’infection, reste la solution la plus efficace avec le préservatif. Selon Santé Publique France, 180 000 personnes vivent avec le VIH, et 86 % d’entre elles connaissent leur séropositivité. Florence Thune, directrice générale de Sidaction, déplore les 5 000 nouveaux cas de séropositivité chaque année en France et estime qu’il faudra encore plusieurs années de recherche avant de trouver un vaccin.