Pierre Pluta, âgé de 77 ans et touché par l’exposition à l’amiante, compte parmi les 1 850 personnes ayant déposé plainte et aspirant à un procès pénal. Cependant, vendredi dernier, leur requête a été considérée comme inadmissible par le tribunal parisien.
L’espoir d’un procès s’éloigne encore pour les victimes de l’amiante. Le 19 mai, la justice a jugé irrecevable la procédure déposée par 1 850 plaignants qui demandaient à ce que 14 personnes soient jugées : des dirigeants d’entreprise, des responsables politiques et des médecins, accusés d’avoir tardé à interdire l’amiante en France alors qu’ils étaient conscients des risques. Les victimes, qui espèrent un procès depuis près de 30 ans, ont été déçues par cette décision. Pierre Pluta, ancien ouvrier et aujourd’hui président de l’Ardeva, une association régionale de défense des victimes, s’est exprimé à la sortie de l’audience : « En tant que victime, on ne peut pas accepter, ni se dire qu’on comprend une telle décision. On ne comprend pas ».
Depuis plus de 25 ans, aucune affaire n’a jamais abouti à un procès concernant l’amiante. Pierre Pluta s’interroge sur l’incapacité de la justice à trouver des réponses à ses propres questions : « On ne peut pas comprendre qu’au bout de 25 ans encore, on se pose des questions. Mais qu’est-ce que c’est que cette justice qui n’a pas réussi, en 25 ans, de faire en sorte de trouver les réponses aux questions qu’elle pose aujourd’hui ? Ce n’est pas normal ! On a fait des recherches, on a retrouvé des documents qui auraient dû être trouvés avant, déjà. Cela n’a pas été fait. Pourquoi ? On ne comprend pas ».
Les juges ont considéré que la procédure portée par les 1 850 victimes était trop floue et imprécise pour qu’un procès puisse se tenir. Les victimes ne pourront donc pas entendre les explications des 14 personnes qu’ils souhaitaient voir jugées au pénal : « Pourquoi le tribunal s’oppose à ce que les victimes s’entendent expliquer les raisons pour lesquelles on a continué à utiliser l’amiante, alors qu’on savait depuis de nombreuses années que c’était cancérogène ? Ce qu’on demande, nous, c’est d’entendre ces personnes, qu’elles disent pourquoi elles ont agi comme ça. Parce qu’on a les preuves, les documents existent, qu’elles ont tout fait pour ne pas que l’amiante soit interdit pendant une très longue période. »
Malgré la déception, les victimes de l’amiante comptent poursuivre leur combat et déposer un nouveau recours qui devrait prendre plusieurs mois. Toutefois, le risque que les mis en cause, tous très âgés, décèdent avant d’être jugés est bien réel. Pierre Pluta, déterminé, affirme : « Je ne baisserai pas les bras. Je l’ai promis aux victimes. Ça me fait mal parce que bon nombre de victimes, sur leur lit de mort, m’ont fait promettre de mener ce combat jusqu’au bout. Et je le mènerai [sanglots]. Mais il y en a marre. Il y en a marre. Il y en a plus qu’assez. »