Nathaniel Mary Quinn présente ses portraits intérieurs pour la 1ère fois à Paris chez Gagosian

L’artiste contemporain des États-Unis présente environ quinze œuvres d’art à la galerie Gagosian, et ce, jusqu’au 29 juillet 2023.

Les portraits noirs monoblocs de Nathaniel Mary Quinn ressemblent à des collages anatomiques complexes où les yeux, le nez et la bouche ont une vie autonome. Cet artiste afro-américain en vogue dans le monde de l’art contemporain présente ses « portraits intérieurs » du 8 juin au 27 juillet 2023 à Paris.

Présent dans plusieurs musées américains, Nathaniel Mary Quinn, âgé d’une quarantaine d’années, est ravi de cette « toute première exposition individuelle » dans la capitale française. Elle a lieu à la galerie Gagosian (8e arrondissement) jusqu’au 29 juillet. L’artiste y présente une quinzaine de toiles et partage sa satisfaction avec l’AFP.

Miroir d’une période difficile

Interrogé sur sa reconnaissance dans le milieu de l’art après des rétrospectives dédiées à Zanele Muholi ou Faith Ringgold à Paris, Nathaniel Mary Quinn estime que « les institutions ont décidé de réveiller la magie et la magnificence de l’art noir qu’elles avaient négligées et qui a toujours été là. La société change, mais l’art, c’est l’art. Le Caravage était bon parce qu’il était bon, pas en raison de sa couleur de peau ».

Intitulée « The forging years » (les années de forge), l’exposition est un mélange d’huile, d’acrylique et de pastel gras. Elle raconte « une période difficile » de la vie de l’artiste, marquée par la mort de sa mère dans des circonstances troublantes, liées à la consommation de drogue de son frère aîné, endetté auprès de dealers. « J’ai été plongé dans le feu de la vie. Cette expérience m’a forgé et a recréé mon identité. Cette exposition le raconte », confie-t-il.

Les portraits de sa famille, de ses amis et de sa communauté évoquent un amas de viscères ou d’organes dans lesquels perce un regard troublant de présence. Ces « portraits intérieurs » touchent aux états d’âme de leurs propriétaires et racontent l’histoire d’un homme né en 1977 à Chicago. Ils évoquent également son enfance dans un contexte familial tendu et violent, l’histoire collective et des thèmes universels liés aux maîtres de l’histoire de l’art.

Une parenté certaine avec Bacon

Nathaniel Mary Quinn, « obsédé par le dessin depuis l’enfance », a conçu en 2013 son « langage visuel » particulier, qui permet de reconnaître sa peinture au premier coup d’œil. « Je devais présenter cinq toiles pour une exposition, je n’en avais que quatre et je n’avais que cinq heures pour réaliser la cinquième. Je me suis donc concentré sur l’essentiel: le visage et, dans ce visage, les yeux, le nez, la bouche et seulement une oreille, rien d’autre », raconte-t-il.

« Pour coller à la règle que je m’étais fixée, j’ai isolé chaque partie du visage: une fois dessinée, je l’ai recouverte de papier, avant de m’attaquer à un autre élément. Lorsque j’ai enlevé l’ensemble du papier, ça a été comme de découvrir un cadeau et la naissance de mon nouveau langage visuel, l’expression de moi-même en tant qu’artiste et être humain », ajoute-t-il, imperturbable sous sa casquette, vêtu d’une chemise blanche sous une élégante veste, d’un jean et de baskets.

« Ce procédé m’a permis de fouiller tout un éventail humain. Il transcende toute croyance sociale, supprime tout conditionnement et me permet aujourd’hui d’exprimer ma vulnérabilité et mon empathie pour rencontrer les fondations de l’humanité, ce qui nous constitue », ajoute ce passionné de Francis Bacon. « Je ressens une certaine parenté avec lui et je l’ai beaucoup étudié », poursuit-il, évoquant aussi un temps passé à étudier la psychologie sur le terrain, lorsqu’il intervenait auprès d’enfants en difficulté, avant de se consacrer à l’art à plein temps.

Si ses portraits rappellent l’utilisation d’images de synthèse, Nathaniel Mary Quinn admet ne pas s’intéresser beaucoup aux nouvelles technologies, hormis les réseaux sociaux. « Je ne pense pas qu’elles auront un impact important sur la création. Pour une bonne et simple raison : c’est qu’elles vont beaucoup plus vite que les êtres humains, qui en sont encore à essayer de se comprendre eux-mêmes ». Après Paris, l’artiste exposera à l’automne dans un grand musée européen dont le nom n’a pas été divulgué.

L’exposition « The Forging Years » de Nathaniel Mary Quinn se tiendra à la galerie Gagosian jusqu’au 29 juillet 2023. Elle sera ouverte du mardi au samedi de 10h30 à 18h30.