Loi Liot: Scénarios possibles après vote contre abrogation retraite à 64 ans

Malgré la désapprobation de l’élément central de la proposition de la législation du groupe Liot par le comité des Affaires sociales de l’Assemblée nationale, les parlementaires de l’opposition prévoient de rester engagés.

La réforme des retraites fait face à un nouveau revirement ce mercredi 31 mai suite à ce que la commission des Affaires sociales de l’Assemblée nationale ait rejeté la proposition de loi du groupe Libertés, Indépendants, Outre-mer et Territoires (Liot) visant à revenir à la retraite à 62 ans. La majorité présidentielle a ainsi remporté une victoire, puisque la commission a adopté une version édulcorée de la proposition après un vote à main levée, avec 38 voix contre 34.

C’est cette version de la proposition qui sera présentée le 8 juin dans la séance publique de l’Assemblée, et en présence de tous les députés. L’article 1 étant supprimé, le débat portera uniquement sur l’article 2, traitant de la conférence sur le financement du système de retraite. Le groupe Liot promet de se battre jusqu’au bout, et Charles de Courson, le rapporteur de la proposition de loi, prévoit de déposer un amendement visant à réintroduire l’abrogation du report de l’âge de la retraite à 64 ans. Toutefois, à moins d’une surprise, cet amendement ne sera jamais débattu, étant donné que la présidente de l’Assemblée, Yaël Braun-Pivet, invoquera l’article 40 de la Constitution qui permet de bloquer les amendements entraînant une charge publique supplémentaire. Ce blocage est considéré comme acquis du côté de la majorité présidentielle.

Dans la pratique, la présidente ne fera pas de déclaration solennelle lors de la séance. Comme l’explique une source au ministère des Relations avec le Parlement, « les services de l’Assemblée nationale vont le faire tomber mécaniquement, comme cela arrive régulièrement ». Ce scénario scandalise le groupe Liot, qui menace déjà de saisir le Conseil constitutionnel. Néanmoins, il est évident que, même si cet amendement n’est pas débattu, de nombreuses interventions sont attendues pour dénoncer ce blocage. « Depuis le début, on est de toute façon dans une volonté de spectacle », déplore une source gouvernementale.

Le porte-parole du groupe socialiste, le député Arthur Delaporte, explique que « toutes les hypothèses sont sur la table », y compris la menace d’une motion de censure brandie par les Insoumis. Du côté du groupe Liot, on estime qu’il est inutile de faire tomber le gouvernement si c’est pour le remplacer par un autre ayant les mêmes méthodes. La majorité tente de clore le débat en rappelant que cette fois-ci, il y a eu un vote en commission. Mais les oppositions, convaincues qu’elles auraient pu l’emporter en séance publique, soutiennent que le vote en commission ne se compare pas nécessairement avec le vote dans l’hémicycle.

Elles dénoncent également des remplacements de dernière minute : en effet, Renaissance et Les Républicains avaient opéré des changements dans la composition de la commission, annoncés au Journal Officiel. Chez les LR, les députés Justine Gruet et Thibault Bazin ont été remplacés par leurs consœurs Anne-Laure Blin et Véronique Louwagie. Justine Gruet avait notamment voté la motion de censure contre le gouvernement le 20 mars, tandis que Véronique Louwagie soutenait le texte de la réforme des retraites. Renaissance a, de son côté, envoyé la présidente du groupe, Aurore Bergé, et son vice-président, Sylvain Maillard, pour remplacer deux députés absents, Servane Hugues et Jean-Carles Grelier.

Ces changements sont qualifiés de « magouilles » par les oppositions, tout comme le refus d’examiner des centaines de sous-amendements. La Nupes réclame d’urgence une conférence des présidents pour faire la lumière sur cette décision de la présidente Renaissance de la commission des affaires sociales et de son bureau. Et si tous craignent que le débat n’ait pas lieu le 8 juin, c’est de nouveau dans la rue qu’ils appellent à l’expression de la colère. « Il faut une pression populaire maximale pour empêcher Yaël Braun-Pivet de dégainer l’article 40 », a lancé Mathilde Panot, la présidente du groupe La France Insoumise, juste avant de quitter la commission.