Lors de sa présentation de la réforme du lycée professionnel, Emmanuel Macron a réitéré plusieurs fois son ambition : atteindre 100% d’insertion dans le monde du travail. Le président français souhaite s’inspirer du succès de l’apprentissage pour parvenir à cet objectif. Cependant, est-il vraiment possible de mettre en œuvre les mêmes solutions que celles qui ont fonctionné pour l’apprentissage ?
Le 4 mai dernier, Emmanuel Macron a présenté sa réforme du lycée professionnel depuis un établissement situé en Charente-Maritime. Le Président de la République a constaté que les jeunes titulaires d’un baccalauréat professionnel éprouvent de grandes difficultés à trouver un emploi, contrairement aux apprentis et aux personnes en alternance. Thomas Giraudeau explique ce « Mot de l’éco » : « Insertion ».
Lors de la présentation de sa réforme du lycée professionnel, Emmanuel Macron a employé le terme « insertion » à plusieurs reprises. La raison en est que ces établissements, qui accueillent un tiers des lycéens, ont beaucoup de mal à intégrer leurs élèves sur le marché du travail. D’après une note des services statistiques des ministères de l’Éducation et du Travail, seulement 40% des diplômés d’un Baccalauréat professionnel ont trouvé un emploi six mois après la fin de leurs études. Pour les élèves en CAP (pâtisserie, petite enfance, coiffure, aide à la personne, etc.), également scolarisés en lycées professionnels, la situation est encore plus difficile : seulement un sur quatre a un emploi six mois après l’obtention de son diplôme.
Cette difficulté d’insertion des lycéens professionnels contraste avec la facilité qu’ont les apprentis à trouver un travail. En effet, deux apprentis sur trois ont un emploi six mois après la fin de leurs études, toujours selon les ministères de l’Éducation et du Travail. Ce chiffre ne concerne que les apprentis de niveau CAP à BTS et exclut les étudiants en licence et en master suivant leur formation en apprentissage, par exemple en écoles de commerce ou d’ingénieurs, qui ne sont pas appelés apprentis mais alternants. Ces étudiants trouvent très facilement du travail après leur diplôme et font d’ailleurs le succès de l’apprentissage et de ses capacités d’insertion, vanté par le gouvernement. Leur nombre a augmenté de manière spectaculaire, surtout depuis la crise sanitaire, où l’État a subventionné massivement les contrats d’apprentis.
Il est possible pour un lycéen professionnel de bénéficier des avantages de l’apprentissage, mais en réalité, seulement un lycéen professionnel sur dix est également apprenti. Il est difficile pour eux de trouver une entreprise qui les embauche en tant qu’apprenti. Les jeunes qui intègrent un lycée professionnel ont en moyenne 15 ans, parfois 14 ans, et sont souvent considérés par les chefs d’entreprise comme n’étant pas assez matures pour travailler, contrairement aux étudiants plus âgés.
Leur niveau scolaire joue également en leur défaveur : 40% d’entre eux ont une maîtrise fragile du français à l’entrée en seconde et 70% en mathématiques. De plus, les lycées professionnels accueillent davantage d’élèves allophones, dont la langue maternelle n’est pas le français. Les syndicats enseignants soutiennent que pour s’insérer sur le marché du travail, les élèves doivent acquérir des expériences professionnelles, mais également un bagage scolaire minimum et maîtriser les compétences de base. Ils ont besoin de cours au lycée pour cela.
Emmanuel Macron semble avoir pris en compte cet argument. Fin août 2022, il annonçait une augmentation de 50% de la durée des stages pour tous les lycéens professionnels. Finalement, il a décidé d’ajouter quatre semaines supplémentaires en fin d’année de terminale, mais uniquement pour ceux qui souhaitent s’insérer directement sur le marché du travail après leur Baccalauréat professionnel. Les autres, désireux de poursuivre leurs études en BTS, bénéficieront de quatre semaines de cours intensifs pour préparer leur entrée dans l’enseignement supérieur.