Le mois dernier, le décès de Lindsay, une jeune fille de 13 ans qui s’est suicidée suite au harcèlement qu’elle a subi sur les réseaux sociaux, a bouleversé la France. Dans ce contexte, l’Oeil du 20h a cherché à comprendre les mesures prises par les plateformes en ligne pour lutter contre ces comportements abusifs. Ils se sont intéressés aux méthodes de contrôle des contenus et à leur efficacité réelle.
Clara, âgée de 16 ans, témoigne de son expérience de harcèlement en ligne. Présente sur des réseaux sociaux tels que Snapchat, Instagram, Tiktok et Facebook, elle souhaite alerter les autres jeunes sur les dangers de ces plateformes: « Je n’ai plus peur de mon image, même si je reçois des remarques et des insultes, ça ne m’atteint plus ».
« Il y a deux ans, j’ai envoyé des photos de moi dévêtue à mon ex-petit ami, qui les a ensuite diffusées sur les réseaux sociaux sans mon accord. J’ai été victime d’insultes et de menaces: « on m’a traitée de tous les noms, de prostituée, on m’a dit que je ne méritais pas de vivre. Je me sentais sale, je perdais toute confiance en moi, je détestais mon corps et je voulais mourir même si j’étais jeune et j’avais encore toute la vie devant moi ».
Clara avait signalé ce harcèlement aux modérateurs des réseaux sociaux, mais sans succès. « J’ai signalé les comptes qui m’envoyaient les photos et les messages, mais les comptes restaient actifs, rien ne changeait ».
Les signalements sont-ils toujours pris en compte? Pour le savoir, j’ai créé plusieurs profils anonymes sur Tiktok, Snapchat et Instagram, les réseaux les plus utilisés par les jeunes, et je me suis envoyé des messages de harcèlement. J’ai signalé ces messages il y a deux semaines, mais les comptes anonymes sont toujours actifs. Par ailleurs, je n’ai reçu aucun retour sur mes signalements.
Tiktok n’a pas répondu à mes demandes d’interview, et Snapchat m’a envoyé un courriel indiquant que « c’est sûrement trop court niveau délai ». Seul Meta, propriétaire d’Instagram, m’a répondu: « Nous avons environ 40 000 personnes dédiées à la sécurité et à la protection des utilisateurs, dont environ 15 000 modérateurs de contenu, et avons investi plus de 16 milliards de dollars depuis 2016 dans ce domaine ».
Devant le manque de réaction des réseaux sociaux, certaines familles appellent le 3018, un numéro gratuit géré par une association et soutenu par l’État, qui aide les victimes de harcèlement en ligne. Une vingtaine de téléopérateurs reçoivent des dizaines d’appels par jour. Lors de notre enregistrement, un adolescent de 14 ans demandait de l’aide pour des menaces d’insultes et de mort qu’il avait reçues sur Tiktok.
En appelant le 3018, les victimes espèrent une réaction plus rapide des plateformes, car l’association travaille en partenariat avec certains réseaux sociaux: « Les gens nous disent qu’ils reçoivent des messages depuis deux ou trois semaines, qu’on les fait chanter, qu’ils signalent le compte, mais rien ne change. C’est un problème, mais nous sommes là pour soutenir le signalement. En passant par nous, cela a un peu plus de poids ».
En cas de cyberharcèlement, il est conseillé de ne pas répondre, de conserver les preuves et de porter plainte, car c’est un délit passible de 2 ans de prison et 30 000 euros d’amende.