Face à une inflation alimentaire qui demeure près de 15% sur une année, le gouvernement organise une réunion ce jeudi 11 mai avec les acteurs majeurs de la grande distribution. L’objectif est de poursuivre la lutte anti-inflation dans les allées des supermarchés et, à long terme, de déclencher des discussions pour revoir les tarifs.
Préparer l’été dès maintenant. Le gouvernement va recevoir ce jeudi à Bercy les représentants de la grande distribution dans le but de négocier la prolongation du trimestre anti-inflation, mis en place début mars, selon des informations obtenues par franceinfo de source gouvernementale. Face à une augmentation des prix alimentaires de plus de 15% sur un an en avril, le gouvernement souhaite discuter avec les distributeurs et l’industrie agroalimentaire de la possibilité de prolonger au-delà de juin les baisses de prix sur certains produits dans les supermarchés.
Comité restreint
Après avoir invité les distributeurs à réduire les prix d’une sélection de produits de mars à juin dans le cadre du « trimestre anti-inflation », le gouvernement envisage de nouveaux moyens d’atténuer l’impact de l’inflation alimentaire au-delà du premier semestre. Selon le cabinet de la ministre déléguée chargée des Petites et Moyennes Entreprises, du Commerce, de l’Artisanat et du Tourisme, Olivia Grégoire, il n’était pas possible d’inviter tous les représentants de la grande distribution. Michel Biéro, directeur exécutif des achats de Lidl, n’a pas été invité. La Fédération du commerce et de la distribution (FCD) doit représenter les absents (mais Lidl n’en fait pas partie).
Cette réunion a lieu car, selon Bercy, aucune baisse de l’inflation n’est prévue : l’objectif est donc de prolonger le trimestre anti-inflation au moins jusqu’à la rentrée scolaire. Car le système fonctionne, assure le ministère de l’Économie : les produits à prix serrés ont encore baissé de moins de 13% en un mois et demi et les Français en ont profité. Ils ont recommencé à acheter un peu de viande, de poisson, de fruits et légumes qu’ils avaient délaissés en raison de prix trop élevés.
Sur ce principe, le gouvernement aimerait également inclure quelques fournitures scolaires dans ce panier anti-inflation, même si, traditionnellement, les promotions ne manquent pas à la rentrée.
Des prix bas cet été ?
La baisse des prix n’est pas pour tout de suite. Mais les participants à cette réunion suggèrent que des « petits prix » sont prévus pour la saison estivale, ne serait-ce que pour jouer la concurrence entre les enseignes. Une enseigne n’a en effet pas vraiment le choix de monter seule ses prix. Mais les distributeurs le disent : pour chacun, ce trimestre anti-inflation coûte plusieurs dizaines de millions d’euros, prélevés exclusivement sur les marges. Pour poursuivre cet effort, il faut donc une nouvelle répartition des coûts, comme l’explique Thierry Cotillard, le patron des Mousquetaires (Intermarché, Netto) invité de franceinfo.
« Ça cartonne », et « il faut couvrir un maximum de produits », a-t-il indiqué, avant d’insister : « 70% des Français prennent un produit sur cinq issu de cette sélection. On va prolonger l’opération, mais la condition est que les industriels participent à l’effort ».
Les solutions recherchées par Bercy
Il reste une question de fond : le ministère a-t-il les moyens de faire revenir tout le monde à la table des négociations ? Car cette réunion reste en petit comité : le ministère de l’Économie promet de recevoir très rapidement les fournisseurs, mais en évitant de mélanger ceux qui se sont déchirés lors des dernières négociations commerciales. Pourtant, ces derniers accepteraient volontiers de partager les efforts avec les industriels, au cœur des discussions. D’ailleurs, les hypermarchés ont envoyé une lettre à leurs fournisseurs pour leur demander de rouvrir ces fameuses négociations, sans réponse pour le moment.
En théorie, il est possible de rouvrir des négociations commerciales, c’est ce que demande Bercy, car les prix baissent nettement pour certaines matières premières : blé, colza, voire énergie, transport. Cependant, du côté des industriels, on souligne plutôt les hausses pour le sucre, le cacao, le café qui flambent, ou encore les oranges, les tomates et aussi le verre. Conclusion des fournisseurs : si les prix devaient être renégociés, ce serait plutôt à la hausse.
Après une demande polie pour reprendre les discussions sur les prix en cas de mauvaise volonté, Bercy menace de pratiquer le « name and shame » : en d’autres termes, publier les noms des grandes marques qui refusent de négocier à la baisse, une très mauvaise publicité. Si cela ne suffit pas, Bercy dispose de l’arme fiscale : des sanctions pour les plus récalcitrants. Aux yeux des grands industriels, ce serait mettre de l’huile sur le feu.