Élection présidentielle Turquie: Erdogan maître des complots face à Kiliçdaroglu, 2nd tour

Alors que le second tour de l’élection présidentielle turque approche, Recep Tayyip Erdogan est en situation favorable face à son opposant Kemal Kiliçdaroglu. Au cours des années, le chef d’état en exercice est devenu un expert pour créer des théories du complot afin de rester au pouvoir.

« De manière certaine, l’élection du 14 mai est une tentative de coup d’État politique orchestrée par l’Occident, une tentative de coup d’État où tout est mis en place pour éliminer la Turquie. » Ces mots ont été prononcés par le ministre de l’intérieur turc Suleyman Soylu deux jours avant le premier tour de l’élection présidentielle, à un auditoire soutenant le président actuel Recep Tayyip Erdogan, qui brigue un nouveau mandat. Face à lui se trouve le candidat de l’opposition Kemal Kiliçdaroglu. La théorie d’un coup d’État organisé par l’Occident, propagée par le camp présidentiel, n’est pas récente. Tristan Mendès France souligne que « le populisme et les périodes électorales sont propices au complotisme ».

Dans cette campagne électorale, la figure de George Soros semble être centrale dans l’esprit complotiste turc. Un compte AKP, pro-Erdogan, tweetait avant le premier tour : « Soit Soros, soit Erdogan ». Rudy Reichstadt note que « c’est un exemple typique de faux dilemme, de fausse alternative. On stigmatise l’opposant d’Erdogan en le présentant comme une marionnette de Soros qui est la figure par excellence du conspirateur mondialiste dans l’imaginaire contemporain ».

Les séismes en Turquie et en Syrie alimentent les théories

Guillaume Perrier, journaliste international au Point et ancien correspondant du Monde à Istanbul de 2004 à 2014, revient sur les théories du complot nées des séismes en Turquie et en Syrie, une catastrophe qui a causé plus de 50 000 décès le 6 février 2023, et qui a inondé les réseaux sociaux, notamment via le hashtag #Haarp. Des internautes affirmaient que les séismes n’étaient pas d’origine naturelle. « On y retrouve le vieux fond d’anti-américanisme », estime le journaliste, « car derrière cela, c’est bien sûr l’idée que les Américains mènent des expériences scientifiques en Turquie sous le couvert de leurs activités au sein de l’OTAN ».

La Turquie est membre de l’OTAN depuis 1953 et, en même temps, selon Guillaume Perrier, « il y a ce fort sentiment d’anti-américanisme qui traverse vraiment toute la scène politique turque. C’est un paradoxe. Concernant les séismes, il y a toujours cette théorie conspirationniste selon laquelle les séismes seraient manipulés par les humains ».

Dans cet épisode, Tristan Mendès France et Rudy Reichstadt analysent les fantasmes autour du Traité de Lausanne, qui marque la fin de l’Empire ottoman et la naissance de la Turquie moderne, ainsi que les théories sur Mustafa Kemal Atatürk, le père fondateur de la Turquie moderne et président de la République de Turquie de 1923 à 1938.

« La Turquie complotiste à l’heure de l’élection présidentielle » est le 48e épisode de Complorama avec Rudy Reichstadt, directeur de Conspiracy Watch, et Tristan Mendès France, maître de conférence et membre de l’Observatoire du conspirationnisme, spécialiste des cultures numériques. Ce podcast est à retrouver sur le site de franceinfo, l’application Radio France et plusieurs autres plateformes comme Apple Podcasts, Podcast Addict, Spotify ou Deezer.